La troisième photo montre quatorze jeunes filles alignées. Jane est la quatrième en partant de la gauche (une croix au-dessus de sa tête la désigne, sinon il serait difficile de la reconnaître). C’est la scène finale du Comte de Gleichen, de Yorick :
Le comte de Gleichen fut fait prisonnier dans un combat contre les Sarrasins, et condamné à l’esclavage. Comme il fut employé aux travaux des jardins du sérail, la fille du sultan le remarqua. Elle jugea qu’il était homme de qualité, conçut de l’amour pour lui, et lui offrit de favoriser son évasion s’il voulait l’épouser. Il lui fit répondre qu’il était marié ; ce qui ne donna pas le moindre scrupule à la princesse accoutumée au rite de la pluralité des femmes. Ils furent bientôt d’accord, cinglèrent, et abordèrent à Venise. Le comte alla à Rome et raconta à Grégoire IX chaque particularité de son histoire. Le pape, sur la promesse qu’il lui fit de convertir la Sarrasine, lui donna des dispenses pour garder ses deux femmes.
La première fut si transportée de joie à l’arrivée de son mari sous quelque condition qu’il lui fût rendu, qu’elle acquiesça à tout, et témoigna à sa bienfaitrice l’excès de sa reconnaissance. L’histoire nous apprend que la Sarrasine n’eut point d’enfants, et qu’elle aima d’amour maternel ceux de sa rivale. Quel dommage qu’elle ne donnât pas le jour à un être qui lui ressemblât !
On montre à Gleichen le lit où ces trois rares individus dormaient ensemble. Ils furent enterrés dans le même tombeau chez les Bénédictins de Petersbourg ; et le comte, qui survécut à ses deux femmes, ordonna qu’on mît sur le sépulcre, qui fut ensuite le sien, cette épitaphe qu’il avait composée : « Ci-gisent deux femmes rivales, qui s’aimèrent comme des soeurs, et qui m’aimèrent également. L’une abandonna Mahomet pour suivre son époux, et l’autre courut se jeter dans les bras de la rivale qui le lui rendait. Unis par les liens de l’amour et du mariage, nous n’avions qu’un lit nuptial pendant notre vie ; et la même pierre nous couvre après notre mort. » Un chêne et deux tilleuls furent, comme il se doit, plantés près de la tombe.