L’année suivante, Grégoire Simpson obtint une bourse dont le montant, bien que peu élevé, lui permettait au moins de survivre sans avoir absolument besoin de se trouver du travail. Mais au lieu de se consacrer à ses études et de finir sa licence, il tomba alors dans une sorte de neurasthénie ; une léthargie singulière dont apparemment rien ne parvint à le réveiller. Ceux qui eurent l’occasion de le rencontrer à cette époque eurent l’impression qu’il vivait en état d’apesanteur, une sorte d’absence sensorielle, une espèce d’indifférence à tout : au temps qu’il faisait, à l’heure qu’il était, aux informations que le monde extérieur continuait à lui faire parvenir mais qu’il semblait de moins en moins disposé à recevoir : il se mit à mener une sorte de vie uniforme, s’habillant toujours de la même façon, mangeant tous les jours dans la même friterie, debout au comptoir, le même repas : un complet, c’est-à-dire un steack-frites, un grand verre de vin rouge, un café, lisant tous les soirs au fond d’un café Le Monde ligne à ligne, et passant des journées entières à faire des réussites ou à laver trois de ses quatre paires de chaussettes ou une de ses trois chemises dans une bassine de matière plastique rose.