Smautf ne comprend plus ce dont il a ainsi voulu se souvenir. Tout ce qui lui revient — et qu’il n’a jamais noté — est que ce Mr. Macklin était un botaniste âgé de plus de soixante ans qui, après avoir vingt ans durant catalogué des papillons et des fougères dans les sous-sols du British Museum, était parti sur le terrain faire l’inventaire systématique de la flore du Kenya. Quand Smautf arriva pour dîner chez le botaniste — Bartlebooth ce soir-là était reçu à Mombassa par le gouverneur de la province — il letrouva agenouillé dans son salon, occupé à ranger dans des petites boîtes rectangulaires des plants de basilic (Ocymum basilicum) et plusieurs échantillons d’épiphylles dont l’un, aux fleurs couleur d’ivoire, n’était manifestement pas un Epiphyllum truncatum et, lui dit-il la voix tremblante, s’appellerait peut-être un jour Epiphyllum paucifolium Macklin (il aurait préféré Epiphyllum macklineum, mais cela ne se faisait déjà plus). Ce vieil homme caressait en effet depuis vingt ans le rêve de donner son nom à une de ces cactées ou, à défaut, à un écureuil local dont il adressait des descriptions de plus en plus détaillées à ses directeurs qui persistaient à lui répondre que cette variété n’était pas suffisamment différente des autres sciuridés africains (Xerus getelus, Xerus capensis, etc.) pour mériter une appellation spécifique.